Au-delà de cette limite, l’art s’en mêle

Discussion sur l’intervention dans la sphère publique avec la commissaire Catherine Sicot et Pascal Paquette/Patrick Thompson : samedi 20 avril de 15h à 17h (au Labo)
Vernissage à l’Alliance Française de Toronto : mercredi 24 avril à 18h30
Vernissage au Labo : samedi 27 avril de 18h00 à 21h00

Au-delà de cette limite, l’art s’en mêle

Se mêle de quoi? Se mêle à quoi?

Ce projet au titre racoleur met en scène deux artistes et complices, Pascal Paquette et Patrick Thompson, présents tant sur la scène artistique contemporaine que dans les ruelles torontoises où, avec leurs pinceaux et leurs bombes aérosol, ils « mangent » les murs de la ville. Autour d’eux, Didier Charrette, journaliste pour la télévision, mélomane, passionné de formes artistiques alternatives et de médias sociaux, viendra documenter et diffuser le travail. Ses outils (Twitter, Web et autres relais d’information) lui permettront de partager ses découvertes avec différents publics et de répondre à la transformation rapide des lieux investis par les artistes.

Les limites dont il est ici question sont de natures diverses. À sa manière, le projet cherche à définir la place et le rôle des pratiques artistiques dans la sphère publique, questions chères à l’art contemporain depuis plusieurs décennies. Il sort des frontières de l’espace d’exposition et ne propose pas un ensemble d’œuvres finies. À la place, il donne à voir un processus créatif en développement, un travail d’installation progressif. Au-delà de cette limite s’infiltre dans plusieurs interstices : le chantier de construction de l’Alliance Française de Toronto, au 24, Spadina Road, la cour privée de la compagnie Krown, située aux abords du Labo (dans le quartier de la Distillerie) et dans la rue (Parliament, qui longe la propriété de Krown). Grâce à l’intervention de Didier Charrette, le projet s’infiltre aussi dans des interstices virtuels, contournant les limites d’espace et de temps.

Les artistes auront recours à un langage de formes abstraites qui s’inspirera des différents environnements. À l’Alliance Française, il s’agira du langage de la construction – panneaux, couleurs fluo, échafaudages, outils, uniformes des ouvriers. Autour de Krown, l’inspiration proviendra de l’autoroute suspendue, des panneaux publicitaires géants destinés aux automobilistes du QEW, et des sites de production industrielle déchus aux allures de no man’s land, convoités par les spéculateurs immobiliers et promis à la démolition.

Pour chacun de ces lieux, les visiteurs, les passants mais aussi des spectateurs privilégiés assisteront à l’évolution quotidienne du travail de Pascal et Patrick. À l’ouest de Krown, de l’autre côté de la rue Parliament, les résidents du 150 Longboat, situé dans le quartier de l’Esplanade, développement urbain expérimental des années 70, se trouveront aux premières loges pour observer la progression du travail. Les artistes ont en tête les différentes perceptions du site, depuis la rue jusqu’au 9e étage, et projettent d’élaborer une approche micro autant que macro de leurs interventions sur le site. Au nord de l’Alliance Française, les résidents de la tour d’habitation du 167 Lowther verront progresser la « fresque » sur le mur arrondi de la future salle de spectacle, et pourront découvrir les différentes interventions à l’étage, aujourd’hui encore sans toit. Ainsi, les artistes proposeront une exposition à un public qui ne s’y attend pas.

Leur travail ne consiste pas en une appropriation des deux sites, mais bel et bien en une cohabitation. Il s’agit effectivement de lieux de travail où une activité quotidienne se déroule. Dans le cas de l’Alliance Française en chantier, le travail de Patrick et Pascal reposera sur une étroite collaboration avec l’équipe de Greenferd Construction. En ce sens, ce projet revêt une forme participative, dont l’aboutissement dépendra de la synergie entre artistes, travailleurs du site (Greenferd Construction et Krown) et institutions (l’Alliance Française et Le Labo).

Les artistes couvriront des surfaces visibles à l’extérieur. À Krown, les œuvres, traces de ce projet, seront donc rapidement et en grande partie recouvertes, le site étant lui-même appelé à disparaître dans les prochaines années. D’autres travaux seront élaborés sur des surfaces « cachées » à l’intérieur des sites. À l’Alliance Française, les artistes créeront en quelque sorte une œuvre permanente sur les murs intérieur et extérieur de la future salle de spectacle . Scellée par les couches de différents matériaux qui recouvriront prochainement ses murs de béton, l’institution enfermera une œuvre qu’elle choisira peut-être un jour de dévoiler (à l’occasion, qui sait, du 200e anniversaire de l’institution?) Ainsi, le projet célèbre à sa façon la construction du nouvel espace de l’Alliance. Bien que de nature éphémère, il nous projette dans le futur…

Dans cette optique, la participation de Didier Charrette revêt un sens tout particulier, puisqu’elle permettra de documenter un projet qui aborde les questions de conservation, mais aussi de disparition.

Enfin, le collectif d’artistes Timeanddesire a été invité à intervenir sur les deux sites pendant la durée du projet. Soulevant à nouveau la question des limites, leur démarche fait partie d’un autre projet intitulé Intervened, qui se déroulera tout au long de l’année sur différents espaces publics du centre de Toronto. Leur projet implique l’installation discrète de panneaux aux allures de signalétiques urbaines qui transgressent avec poésie et humour le contenu et le rôle traditionnel de ce type de signalétique. Timeanddesire s’inspirera aussi des différents environnements, et du travail de Pascal et Patrick.

C’est donc à l’AFT, au Labo, chez Krown et sur les plateformes virtuelles de Didier Charrette que Patrick Thompson, Pascal Paquette et Timenanddesire vous donnent rendez-vous tout au long du mois d’avril, le temps d’un projet voué à se faire, se défaire, se refaire, s’entremêler, se dérouler, avant de disparaître…

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SURRO-GATED (Performance de 30 avril et 1 mai) :

Pascal Paquette et Patrick Thompson ne peuvent pas intervenir sur le chantier de l’Alliance Francaise de la façon dont le projet l’avait initialement prévu, pour des raisons de sécurité, et autres limites imposées par les règles de la construction. Afin de contourner ces obstacles, l’enteprise Greenferd a proposé un nouveau cadre de travail aux artistes : installer sur le chantier des oeuvres réalisées sur des supports de leur choix. Les employés de Greenferd s’occuperaient eux-mêmes de l’installation selon les instructions données par les artistes.

Fervents « muralistes » peu intéressés par ce compromis, Pascal et Patrick ont à leur tour fait une proposition qui s’en inspire et qui a été suivie par Greenferd: ils ont invité deux employés de l’entreprise, Gabriel Gennaro et Robert Stephens, à devenir leur substituts et collaborateurs, le temps d’une performance qui se déroulera les 30 avril et 1er mai, de 15h30 à 18h00, sur le mur extérieur du théâtre de l’ AFT en construction.

Bien qu’ils soient hautement qualifiés dans leurs domaines respectifs, ces collaborateurs n’ont pas de formation ou de pratique artistique. Durant cette performance, ils vont devenir les « mains » de Pascal et Patrick, qui se tiendront quand à eux dans l’espace public, à 20 pieds de la zone officielle du chantier. De ce poste d’observation, ils orchestreront la création de la murale en donnant des directions à Gabriel et Bob, et tenteront de réaliser une oeuvre qui se rapprocherait au plus près de leur propre travail.

Merci à Ralph Carnovale et Don Brown de l’entreprise Greenferd Construction. Greenferd Construction est co-sponsor de cette performance.

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LES DEUX INSTITUTIONS

Le projet répond à une discussion engagée par les deux institutions, Le Labo et l’Alliance française de Toronto sur les liens possibles entre l’art et la sphère publique, et aux caractéristiques et contraintes spécifiques de ces deux institutions. Partageant une même volonté de sortir de leurs cadres habituels, les deux organismes ont souhaité créer un projet commun hors de la galerie sur les murs en intégrant leur paysage ou contrainte actuelle.

L’Alliance française en pleine construction voit ses murs mouvants se construire et se déconstruire. De son côté, Le Labo, situé dans le quartier historique de la Distillerie a souhaité sortir du studio et du patrimoine tout en restant dans le quartier qui est le sien.

Ainsi, ensemble ils ont décidé de construire le projet Au delà de cette limite, l’art s’en mêle sous le commissariat de Catherine Sicot.

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BIOS

CATHERINE SICOT
Catherine Sicot, commissaire et productrice indépendante, s’intéresse au rôle de la production artistique dans la sphère publique. Elle développe actuellement des projets au Canada, à Cuba et en France dans le cadre de sa nouvelle entreprise: Elegoa Cultural Production. Son expérience dans le cade de musées (Musée d’art Moderne de la Ville de Paris, (Paris, France) Oakville Galleries, contemporary art museum (Oakville, Ontario, Canada)), et auprès de différents centres d’arts et organisations à but culturel (Mercer Union, centre for contemporary art, 4Unity Productions Youth Media Association) l’ont conduite de la création de programmes éducatifs et publiques, vers l’initiation et la gestion de projets pluridisciplinaires et interculturels “hors les murs” impliquant artistes, communautés et partenaires sociaux.

PASCAL PAQUETTE
Une personne renommée dans deux mondes d’art distinctifs. Pascal Paquette a passé la dernière décennie en traversant la scène d’art contemporain, et en développant son apprentissage et sa pratique sous le pseudonyme Mon Petit Chou. Ses intérêts thématiques examinent la transformation de la culture quand deux (ou plusieurs) réalités économiques, sociales, ou culturelles s’en mêlent. Il travaille principalement avec l’art visuel, mais il emploi aussi le graffiti et la photographie dans ses projets qui sont souvent liés à un environnement précis. Paquette est diplômé du programme des arts graphiques à la Cité collegiale à Ottawa, Canada.

PATRICK THOMPSON
Né en 1978 et basé à Ottawa, Patrick Thompson appartient au courant canadien des artistes de rue. Ses installations, peintures, fresques, gravures et sculptures explorent l’information à travers les médias de masse, l’architecture, l’histoire et les dynamiques de la culture.
 Reconnu pour ses fresques murales à grande échelle, il compte parmi ses
 créations : Mural Painting, réalisé pour l’Université Quest (Squamish, Colombie-Britanique, 2008) et Iqalut Cultural Mural, à l’Hopital Général de Qikiqtani (Iqaluit, Nunavut). Son travail a été présenté dans le cadre d’expositions majeures dans les principaux musées canadiens tels Housepint project (Royal Ontario Museum, 2008) et OFFGRID (Musée des Beaux-Arts d’Ottawa).
 Pour Patrick Thompson, le voyage a toujours été une source d’inspiration. Récipiendaire de la bourse CYAN (Canadian Youth Arts Network conference, Soutien au Voyage) Patrick a passé huit mois en 2011 à voyager en Chine (Nanjing), en Thailande, à Myanmar et au Laos. Il a terminé son voyage par un séjour d’un mois et demi dans l’Arctique canadien. Chaque voyage contribue à développer son processus créatif.
« Quand je voyage, ce n’est pas immédiatement évident ce que j’ai retiré du séjour, ce que j’ai appris, mais je sais que cela changera l’objet de mon art et influencera ma pratique », Patrick Thompson.

DENISE ST MARIE
A pratiqué de l’art urbain d’intervention pendant plus que 10 ans. Elle a étudié les beaux arts à l’université de Victoria, B.C., où elle a mêlé ses études en sociologie et psychologie dans ses œuvres. Son style a évolué d’un intérêt profond de la perception et l’impression, qu’elle explore à travers des interventions, les textes, et l’iconographie. St Marie capture l’existence d’une œuvre grâce à la documentation ; l’impression que l’on voit est une impression de sa durée de vie souvent éphémère et inconnue. C’est de cette pratique et histoire que St Marie a développée le nom Timeanddesire, un pseudonyme rétroactif pour ses propres œuvres anciennes ou en cours, en incluant des collaborations récentes. St Marie a été reconnue financièrement au spectacle Boom ! au Mississauga Living Arts Centre comme artiste émergente en 2010. Elle a été aussi mandatée en 2010 pour guider un projet sponsorisé par Art on the Move.

En 2011, Timeanddesire a été invité à rejoindre No New Enemies, réseau international des artistes urbains en Belgique. St Marie a aussi présenté différents courts métrages lors du Toronto Urban Film Festival en 2011 et 2012 et a présenté plusieurs projets d’interventions urbaines pour l’événement Art on the Danforth 2012. Ses œuvres ont été aussi sélectionnées par le magasine Prefix Photo Journal en 2011. Elle a obtenu une subvention en tant qu’artiste émergente en 2010 et 2012 du Conseil des arts de l’Ontario, ainsi qu’une autre du Conseil des Arts du Canada en 2012.

DIDIER CHARETTE
Jeune professionnel des communications médiatiques, Didier Charette est bachelier de l’Université de Montréal. Depuis son enfance, le réalisateur né à Hawkesbury, Ontario a cherché à explorer les limites des outils de communication. Il a notamment travaillé comme journaliste pigiste, réalisateur, photographe, directeur artistique et reporter au sein de plusieurs médias. Son expérience lui permet aujourd’hui de prendre d’assaut la Ville Reine en tant que réalisateur/producteur de BRBR (www.tfo.org/brbr), une nouvelle émission multiplateforme francophone sur la musique émergente canadienne pour le Groupe Média TFO.