Le Labo a le plaisir de présenter « Distances » de Sébastien Rollot & Pierce Warnecke ainsi que « DataDecay » de Pierce Warnecke, deux environnements audiovisuels qui bouleversent les notions de linéarité et d’espace-temps.
À partir d’images filmées sur les îles de Java et de Bali en Indonésie, le documentaire expérimental Distances restitue de façon envoutante les sensations collectées au hasard de la route : l’effort physique d’hommes au travail, une cérémonie religieuse funéraire agitée, le voyage dans un wagon suffocant, les jeux d’enfant.
Pour le réalisateur Sébastien Rollot, « on ne voit que des visages, des corps, des expressions, sans véritablement connaître la situation en jeu. Elle est ici accessoire, elle importe peu. On ne s’intéresse alors qu’à la sensation et au mouvement dans lequel on est entraîné. Sans repère, on erre dans le film et l’on s’accroche au langage des corps, des regards, à l’émotion d’une image et à l’histoire qu’elle peut nous raconter. L’écriture du film nous entraîne ainsi dans un rêve, une mémoire fragmentée. On se laisse porter par la juxtaposition d’images brutes, sans artifices. Des hommes autour d’un feu, un train la nuit, des femmes qui se maquillent… Les séquences documentaires sont traitées de façon abstraite, sans visée anthropologique ou sociologique explicite. Ces images ne parlent que d’errances. Celles des corps et des imaginaires.»
Aucun dialogue ni commentaire, mais la musique de P. Warnecke, dont le travail des espaces et des textures sonores sans structures ou rythmiques marquées, minimal et abstrait, renforce la sensation d’un mouvement continu, d’un temps et d’un réel sans rupture. Dans un contexte musical, les images quotidiennes s’écartent définitivement du réalisme et nourrissent une expérience très étrange.
Les images de S. Rollot et la musique de P. Warnecke, c’est un peu la rencontre de la musique numérique et de la réalité d’un autre bout de la planète : elle est pleine d’antagonismes. C’est une pièce à la fois sensible et cérébrale, dense et minimaliste, documentaire et abstraite. Ces antagonismes tirent le spectateur entre plusieurs réalités et points de vues, lui faisant parcourir autant de distances.
« Distances » est mis en vis-a-vis avec « Data Decay », pièce audiovisuelle crée entièrement par P. Warnecke. « Data Decay explore l’interactivité en mettant le spectateur face à ce qu’il perçoit à première vue comme interactif. Des formes minimales sonores et visuelles sont générées à partir de données numériques collectées dans différents laboratoires de recherche scientifique. La tendance interactive de départ est ensuite détériorée, délinéarisée et rendue chaotique par l’évolution imprévisible des données. »
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Images tirées de « Distances », 26 mn
Réalisation : Sébastien Rollot
Musique et mixage : Pierce Warnecke