Carte blanche d’écriture

Par Ophélie Pichon

Je définirais Isabelle Michaud comme une artiste qui se veut totale, et qui fait disparaître la frontière entre vie quotidienne et art. Elle a su trouver au fil des ans, dans la ville de Sault Sainte-Marie au nord de l’Ontario, une manière de vivre profondément en jachère, dans un rythme qu’elle a su comprendre et écouter, le sien. En accord avec sa communauté et son environnement, elle nous confie:  « C’est important pour moi de maintenir un rythme qui va s’allier avec mon rythme de femme, mon identité… Je m’assure de toujours avoir un roulement, c’est aussi un projet à la fois, mais je lui donne toute ma présence. »

Étant sensible au sujet abordent la vie domestique, l’insécurité linguistique, l’éco-anxiété ainsi que l’identité, son ambition première et de transmettre son vécu et les bienfaits de prendre le temps, de savourer la vie. Artiste s’exprimant par la peinture naturelle, la marche, la vidéo, la rotoscopie ou encore la poésie, ses œuvres portent un regard optimiste et apaisant sur le monde. Son inspiration se forme par son identité de femme, sensible à l’écologie et son milieu, francophone dans une ville ayant subi une crise linguistique, ayant un fils autiste et ayant ouvert une microgalerie dans son atelier appelée ‘’La Galerie Sans Clous’’.

«Je suis toujours optimiste, ma tendance personnelle est de trouver des solutions qui vont m’aider dans l’immédiat. Avec ces médiums [numériques], je peux continuer à faire du travail visuel et de dessin sans créer trop de choses matérielles, qui s’empilent. Je cherche des formes d’art qui vont m’aider à moins me porter sur l’accumulation, que je pourrais recycler, ou utilisant moins de matériaux.»

Ex/in/an terieurs a été créé pendant la pandémie de la Covid19. Un temps dans la vie d’Isabelle où elle se sentait autant en dedans qu’en dehors de son existence, en manque de sens et où la nature sauvage et son jardin lui ont donné la force de continuer, la guérissant par la rencontre. Les relations à la matière étant importantes à son langage, elle nous montre les bienfaits de la nature de l’île Saint-Joseph par les images de blocs de granite, brutes et texturées. L’artiste vient alors s’immiscer comme une étrangère dans ce paysage pour finalement en faire partie entièrement, son texte nous guidant dans ses pensées.

Pour son film Edison-Dandelion, l’artiste utilise la technique de la rotoscopie. En dessinant image par image sur la vidéo précédemment enregistrer certains éléments, elle nous raconte une histoire de célébration de moment de vie simple, de geste intemporel.

« Je voulais qu’il y ait des gestes qui puissent être faits dans n’importe quel temps ou époque. J’ai essayé de ne pas trop mettre d’indice, on peut voir mon t-shirt qui est du XXIe siècle, mais aussi un fer à repasser des années 1880 et le phonographe d’Edison avec des cylindres en cire où la musique qui en sortait était vieille de 100 ans. Je souhaitais que les gestes soient les plus universels possibles. Passer une paire de chaussures, repasser ou encore sentir une fleur, comme des gestes de pleine conscience avec son environnement. »



Ce texte a été composé dans le cadre du partenariat du Labo et du festival CinéFranco qui présente les films de 6 cinéastes francophones du Labo dans la catégorie Court-Toujours.